Peut-on utiliser les images venant d’un système de video-protection pour justifier un licenciement ?
Thibault du MANOIR de JUAYE
Avocat à la Cour
Pour la revue En toute sécurité
La Cour d’appel de Montpellier dans une décision du 9 septembre 2015 vient de valider des preuves recueillies contre un salarié grace à un système de vidéoprotection licencié notamment pour vol de marchandises. Elle devait néanmoins lui donner raison sur d’autres fondements, mais seuls les aspects de protection électronique nous intéressent.
La vidéoprotection était installée dans une station service
Le salarié soutenait que le système de vidéoprotection aurait du être porté à sa connaissance, avoir fait l’objet d’une autorisation préfectorale et être déclaré à la C.N.I.L. (Commission Nationale de l’Informatique et des Libertés).
De manière presque brutale, la Cour d’appel a rejeté cette argumentation en constatant que :
Dans son contrat de travail le salarié reconnaissait avoir été informé que la société était équipée d’un système de vidéo surveillance. De plus, le règlement intérieur comprenait des mentions spécifiques : « afin de se conformer à la législation sur la vidéo surveillance ( article 10.6 de la loi du 21 janvier 1995), la SARL X. a déposé une demande d’agrément de la Préfecture en date du 1er avril 2010. Le personnel a été parfaitement avisé et accepte d’être filmé par des caméras vidéo situées dans l’enceinte de l’entreprise« .
L’employeur avait effectué les déclarations exigées à la préfecture et ces déclarations étaient accompagnées de plan montrant qu’une caméra était implantée derrière la caisse de l’établissement et que son champ de vision incluait non seulement cette caisse mais le siège occupé par le caissier, visualisé de l’arrière et qu’une seconde caméra visualisait l’entrée de l’établissement.
L’autorisation de la CNIL n’était, d’après la Cour, pas nécessaire puisque l’autorisation concernait un lieu ouvert au public et qu’il ne s’agissait pas de recueillir les données personnelles nominatives sur les salariés. De plus les enregistrements étaient détruits dans un délai d’un mois.
La Cour d’appel a considéré que la finalité du système était parfaitement justifiée dans la mesure où le salarié était amené à manipuler de l’argent et qu’il était de ce fait totalement exposé aux risques de braquage lors des opérations de caisse.
Il ne semble pas que le conseil du salarié ait invoqué les dispositions de l’article L254-1 du Code de la sécurité intérieure et il n’est pas précisé si le système avait été déclaré uniquement pour prévenir d’éventuels braquages ou également pour surveiller les salariés.
Enfin, la position de la Cour sur l’absence d’obligation de déclarations à la CNIL pourrait être discuté, puisque le salarié étant reconnaissable sur les enregistrements, il y avait collecte d’informations nominatives.
Auteur : Thibault du Manoir de Juaye, avocat à la Cour, spécialisé en intelligence économique et en droit de la sécurité privée.
Publié le 6 juillet 2016.
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