Le devenir de la sûreté ferroviaire dépendant de la sûreté générale de la SNCF

Article paru dans la revue En toute sécurité.

Ce n’est sans doute pas une coïncidence mais plus la résultante d’une action de lobbying. Plusieurs parlementaires ont interrogé, fin 2019, le Ministre des transports sur le devenir de la sûreté ferroviaire dépendant de la sûreté générale de la SNCF (que nous appellerons SUGE).

Les réponses, qui sont très proches les unes des autres, ont été données le 11 août dernier et il est à craindre qu’elles ne satisfassent pas les parlementaires interrogateurs. En effet, les réponses ne sont pas de nature à rassurer la SNCF sur le devenir de la SUGE et elles tentent de ménager le chou et la chèvre, la SUGE et la sécurité privée.

La SUGE, service de sûreté générale de la SNCF, compte actuellement environ 2 800 agents itinérants. Elle a été créée en 1939 et elle doit veiller à la sécurité des personnes et des biens, protéger les agents de la SNCF et son patrimoine et veiller au bon fonctionnement du service. La prévention des violences et des atteintes à caractère sexiste dans les transports publics est un axe prioritaire de son action.

La crainte de la SUGE provient du fait que les réseaux ferrés sont ou seront ouverts à la concurrence prochainement (compter du 3 décembre 2019 pour les TER et TET et du 14 décembre 2020 pour les TGV) et elle a obtenu la possibilité d’intervenir au profit d’autres sociétés ferroviaires.

En revanche, ces sociétés n’ont aucune obligation de faire appel à elle.

Cette autorisation donnée par la loi n° 2018-515 du 27 juin 2018 pour un nouveau pacte ferroviaire a fait grincer quelques dents. En effet, qu’une société qui ne soit pas de sécurité, en l’occurrence la SNCF, soit autorisée à rendre des prestations dans ce domaine est apparue comme une entorse au principe d’exclusivité qui existe dans le Code de la sécurité intérieure.

Le Ministre des Transports, dans ses réponses, se contente de rappeler le rôle de la SUGE et celui de la sécurité privée, sans prendre parti pour l’une ou pour l’autre et évoquant même une complémentarité entre les deux.

Mais, le fond du problème réside sans doute dans la tarification ; dans un avis très détaillé et fort intéressant[1], (n° 2019-042 du 11 juillet 2019), l’Autorité des transports a estimé que le prix de vente horaire d’un agent de la SUGE ne devait pas excéder 84,13 euros et l’on imagine difficilement la SNCF vendre à un prix moindre compte tenu de l’interdiction de vente à perte. Ses charges sont d’ailleurs exposées dans l’avis de l’autorité de tutelle. Ce montant est très important comparé au prix de vente d’un agent privé de sécurité.

[1] https://www.autorite-transports.fr/wp-content/uploads/2019/07/version-publique-avis-2019-042-drs-2020.pdf

 

Pour la revue En toute sécurité, par Thibault du Manoir de Juaye, avocat à la Cour, spécialisé en intelligence économique et en droit de la sécurité privée.
Publication sur ce blog le 10 novembre 2020.

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